Appliquer les critères de standards de marché européens sur les produits de la pêche à des cas concrets – Etude d’opérabilité et développements méthodologiques
Une collaboration de Sayari avec des étudiants de l’Ecole polytechnique sur l’impact de la pêche sur la biodiversité
Cette année encore (2022-2023), nous avons encadré des étudiants de l’Ecole polytechnique dans le cadre de leur projet scientifique commun. Objectif : Etablir un indicateur d’impact sur la biodiversité pour les produits de la pêche. Le point de départ est une publication du CSTEP sur les critères de durabilité des produits de la pêche. Le CSTEP (Comité Scientifique et Technique et Economique des Pêches) est l’organisme scientifique halieutique de la Commission européenne. Il a proposé des critères (qualitatifs) pour évaluer cette durabilité en 2020 [1], en indicateurs (quantitatifs) pour objectiver ces critères en 2022 [2]. Ce projet a donc permis d’opérationnaliser ces critères de pêche durable en les confrontant aux données disponibles.
Ce projet a permis aux élèves-ingénieurs de s’approprier la démarche de recherche scientifique : analyse bibliographique, développement de méthode, collecte de données, application à des cas d’étude, analyse critique, rédaction et vulgarisation scientifique. Supervisés par Grégoire et Aurore, ils et elles ont suivi un calendrier rigoureux (Figure 1).
Figure 1. Déroulé du projet et présentation des membres de l’équipe. De gauche à droite : Flore Baize-Roch, Aymeric Bes-de-Berc, Ines Fonquernie, Anaïs Bourissou, Ambre Price ; Grégoire Gaillet, Aurore Wermeille.
L’objectif était de confronter les méthodes d’évaluation de critères de pêche durable aux données disponibles directement sur les produits : espèce pêchée, zone de pêche et technique de pêche.
Leur travail a permis de :
- Proposer des méthodes d’évaluation pour la majorité des critères ;
- Les appliquer à des cas d’étude en les comparant avec des résultats attendus de durabilité issus de la littérature ;
- Développer un recul critique sur la pertinence et la faisabilité des indicateurs.
5 des 8 indicateurs environnementaux du CSTEP ont été étudiés sous l’angle de l’impact sur la biodiversité ; ils ont été testés sur 17 cas d’étude (Figure 2).
Figure 2. Critères qualitatifs de durabilité proposés par le CSTEP (à gauche) et indicateurs quantitatifs étudiés dans le cadre du projet (à droite). L’indicateur quantitatif « Impact sur les espèces ETP » est considéré comme important mais n’a pas été étudié dans le cadre de ce projet car en attente de la méthode en cours de développement par le CSTEP. * ETP = Endangered, Threatened, and Protected species (Espèces en danger, menacées et protégées ).
Quelques aspects méthodologiques :
Pour l’indicateur « Pression de pêche », une méthode alternative à celle du CSTEP a été développée. Elle permet la prise en compte systématique de la biomasse et de la mortalité du stock, ainsi que leurs stabilités respectives. Cette méthode est plus discriminante que la méthode initiale (CSTEP) permettant une meilleure distinction de l’impact de la pression de pêche sur les différents produits.
La méthode CSTEP pour l’indicateur « Impact sur le fond marin » a été suivie : elle est applicable sur l’ensemble des produits. L’application aux cas d’étude montre que cette méthode donne surtout des notes extrêmes : les poissons pélagiques obtiennent majoritairement A alors que les poissons de fond obtiennent majoritairement E, avec peu de nuances.
Une méthode est en cours d’élaboration au sein du CSTEP sur l’indicateur « Impact sur les espèces ETP (En danger, Menacées et Protégées) ». Elle n’a donc pas été étudiée dans le cadre de ce projet.
Afin d’évaluer l’indicateur « Rejets et captures accessoires », une première méthode a été développée. Elle permet la prise en compte des caractéristiques des engins de pêches : engins de fond vs pélagiques, engins actifs vs passifs, filet vs ligne… La méthode pourra être améliorée sur base bibliographique et à dire d’expert pour prendre en compte la vulnérabilité de la zone de pêche, les mesures d’évitement et les caractéristiques de l’espèce ciblée. L’orthogonalité de cet indicateur avec les deux précédents nécessite encore quelques ajustements.
Dans le but d’évaluer l’indicateur « Impact sur le réseau trophique », une méthode a été développée. Celle-ci prend en compte le niveau trophique de l’espèce et la biomasse relative du stock pêché, deux éléments importants pour mesurer la complexité des écosystèmes marins. Cette approche est toutefois perfectible ; d’autres critères devront être inclus ultérieurement, pour prendre en compte les relations non trophiques et le rôle des espèces clefs-de-voûte.
Une méthode clef-en-main est proposée pour évaluer la performance des Organisation régionale de gestion des pêcheries (ORGP) dans le cadre de l’indicateur « Gestion des pêcheries ». Elle prend en compte des critères écologiques, de gouvernance et de transparence. Les ORGP régionales et spécifiques sont évaluées et classées dans le Tableau 1.
Tableau 1. Classement des Organisations Régionales de Gestion des Pêcheries selon l’indicateur développé dans le cadre de ce projet. Sont distinguées les organisations définies géographiquement (rouge) des organisations définies par les espèces qu’elles étudient (espèces migratrices – jaune). Les 4 océans sont distingués (nuances de bleu).
Les indicateurs « Empreinte carbone » et « Déchets et pollution » sont couverts par l’Analyse de Cycle de Vie. Ils n’ont donc pas été étudiés dans le cadre de ce projet.
Enfin, un indicateur agrégé a été proposé, prenant en compte le niveau de pertinence vis-à-vis de la biodiversité et le niveau de robustesse des critères inclus (Figure 3).
Figure 3. Classement et pondération des critères individuels pour obtenir l’indicateur agrégé.
La collecte de données, un enjeu majeur du projet :
- Les données scientifiques se décomposent en plusieurs catégories : i) les données fixes biologiques des espèces et informations des écosystèmes et des ORGP et ii) les données temporelles et spatiales d’état des stocks et de pression de pêche. Ces données peuvent être complexes à collecter, et l’expertise de Sayari a permis de croiser les différentes bases de données, d’en juger la pertinence et de déterminer les proxys adéquats.
- Les données du produit {espèce – zone – engin} peuvent être insuffisantes pour identifier le stock, ou différents critères selon la précision des informations. Nous avons travaillé sur la collecte d’information détaillée afin d’effectuer l’évaluation la plus fine possible.
Tableau 2. Notation des différents scénarios de produits testés. Les produits sont classés du plus vertueux au moins vertueux. NB : La note n’a pas pu être obtenue pour deux scénarios {Homard européen (Homarus gammarus) – Mer d’Irlande Est – Casier} et {Coquille Saint-Jacques (Pecten maximus) – Manche-Baie de Saint-Brieuc – Pêche en plongée) car ces deux espèces sont détritivores et n’ont pas de niveau trophique.
Messages clés du projet
- Notre coopération avec le monde académique porte ses fruits : pour les élèves qui ont développé de nouvelles compétences et connaissances et ont été félicités pour la qualité de leur travail ! Mais aussi pour la mise en œuvre des connaissances scientifiques, nous permettant de proposer aux preneurs de décisions des méthodes opérationnelles d’évaluations d’impacts environnementaux.
- Trois indicateurs ont été finalisés :
- Les indicateurs « Pression de pêche » et « Impact fonds marins » avec les méthodes CSTEP confrontées aux méthodes de ce projet,
- L’indicateur « Gestion des Pêcheries » avec la méthode développée dans ce projet, clef-en-main pour évaluer les organismes.
- Deux indicateurs ont fait l’objet d’un premier développement scientifique. Des développements supplémentaires permettraient de les rendre opérationnels.
- L’enjeu de la donnée scientifique et de la donnée produit (renseignée par le fournisseur) est majeur et l’expertise et les ressources de Sayari permet de les relier efficacement pour une évaluation pertinente des impacts environnementaux de la pêche.
[1] STECF, « Scientific, Technical and Economic Committee for Fisheries (STECF) – Criteria and indicators to incorporate sustainability aspects for seafood products in the marketing standards under the Common Market Organisation (STECF-20-05) », 2020.
[2] STECF, « Scientific, Technical and Economic Committee for Fisheries (STECF) – Validation of selected sustainability indicators and underlying methodologies for the revision of the EU marketing standards for fisheries products (STECF-22-12) », 2022.
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