La face cachée des saumons d’élevage : leur alimentation met en danger certaines espèces marines
Etude d’impact de l’aquaculture (saumon d’élevage) sur la biodiversité.
Le déclin rapide de la biodiversité est devenu une préoccupation majeure ces dernières années.
L’alimentation humaine en est la cause principale. Si la biodiversité terrestre fait l’objet de nombreuses études, la biodiversité marine est moins souvent étudiée. C’est l’objet de ce cas d’étude.
Alors que la part de poissons dans l’alimentation humaine est en augmentation, quel est l’impact sur les écosystèmes des différents moyens de productions des produits de la mer ? Les stocks marins actuels ne permettent pas de couvrir la demande mondiale, et, dans les dernières décennies, l’aquaculture a pris une place de plus en plus importante. Notre étude s’intéresse au cas du saumon (Salmo salar), un des poissons les plus consommées au monde afin de déterminer son impact sur les écosystèmes marins au travers de deux méthodes de production : la pêche et l’aquaculture.
Objectif : combiner ACV et écologie
L’objectif de cette étude est d’étudier l’impact sur la biodiversité de l’aquaculture. La méthode utilisée est l’analyse du cycle de vie (ACV) appliquée à la production du saumon d’aquaculture jusqu’à son arrivée au port (Figure 1). Dans un deuxième temps, cette étude comparera les résultats obtenus par l’aquaculture à ceux de la pêche, très règlementée en Norvège. Nous considérons dans toute l’étude les impacts d’un kilo de saumon frais à son arrivée au port.
Les indicateurs ACV couvrent trois des cinq pressions sur la biodiversité : le changement d’habitat, les pollutions et le changement climatique. Dans cette étude, nous couvrons également les deux pressions manquantes : la surexploitation et les espèces invasives. Nous nous appuyons pour cela sur la littérature écologique.
Résultats
La Figure 2A met en évidence l’influence dominante de l’alimentation des saumons dans l’impact du saumon d’élevage. Alors que la figure 2B permet de visualiser comment l’empreinte biodiversité du saumon d’élevage diffère de celle du saumon sauvage.
De plus, il faut savoir que l’impact de l’alimentation des poissons ne se restreint pas uniquement aux impacts habituellement considérés en ACV : utilisation des terres, changement climatique et pollutions. En effet, l’alimentation des saumons d’élevage est constituée en particulier de farine de poissons, constituée essentiellement à partir d’anchois péruviens. Comme nous le voyons dans la figure 3, ces stocks sont aujourd’hui surpêchés alors que l’impact sur les saumons sauvage est maîtrisé en raison de règlementations strictes et de quotas de pêche. Ainsi si l’aquaculture à permis de préserver les stocks de saumons sauvages, il est important de noter que le problème de surpêche a été déplacé et non pas résolu puisque les anchois péruviens vont être amenés à disparaitre d’ici 10 ans si nous ne réagissons pas (Figure 3).
Par ailleurs, il faut savoir que certains saumons d’aquaculture arrivent s’échapper des cages dans lesquelles ils sont élevés. Ils sont dès lors considérés comme « espèces potentiellement invasives » en raison de leur forte propension à propager des parasites (poux de mer) aux espèces sauvages. De plus, lorsque les saumons échappés se reproduisent avec des espèces sauvages, leurs descendants sont souvent moins fertiles ce qui conduit progressivement à une disparition de l’espèce sauvage. L’impact des saumons d’aquaculture en tant qu’ « espèce invasive » peut être observé dans la figure 4. A noter que le saumon sauvage n’a aucun impact en tant qu’espèce invasive puisqu’il est natif du milieu.
Conclusion :
Cette étude montre que la production de saumon d’élevage à un impact non négligeable sur les écosystèmes. Il faut toutefois noter que le faible impact du saumon sauvage est essentiellement dû à la récente mise en place d’une règlementation très stricte concernant la pêche du saumon sauvage en Norvège, ce qui permet aujourd’hui de préserver l’espèce.
En revanche, il est urgent de trouver des solutions d’alimentation durable pour les saumons d’élevage, répondant à leurs besoins nutritionnels. Une piste prometteuse sont les aliments à bases de farine d’insectes. Finalement, la littérature scientifique met en avant le potentiel impact des espèces produites par l’aquaculture à causer des dommages importants sur les écosystèmes lorsqu’ils parviennent à s’échapper. Notre étude montre un impact modéré des saumons échappés, en accord avec le caractère relativement peu envahissant des saumons échappés par rapport aux autres envahisseurs marins.
Cette étude à permis d’appliquer pour la première fois la méthode PBF (Product Biodiversity Footprint) sur les produits de la mer. La méthode à été adapté spécifiquement afin répondre aux besoins du secteurs, à savoir : i) la prise en compte de la surpêche et ii) la quantification des impacts des espèces invasives dans le milieu marin.
A noter encore que ce projet a été réalisé en lien avec une équipe d’étudiants de l’Ecole Polytechnique. Merci à eux pour leur travail et leur motivation sans faille qui a permis la réalisation de cette étude. Elle a été publiée par European Buisness @ Biodiversity et peut être retrouvé ici.
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Membre du Comité consultatif technique du PEF (Product Environmental Footprint).
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